ThoughtSpot, le Google de la data visualisation

ThoughtSpot, le Google de la data visualisation Valorisée près de deux milliards de dollars, la start-up californienne démocratise l'accès à la visualisation de données via des requêtes en langage naturel. Elle ouvre un bureau à Paris.

Encore une licorne américaine méconnue de ce côté-ci de l'Atlantique. Spécialiste de l'analyse de données dopée au machine learning, ThoughtSpot a levé 248 millions de dollars fin août. En portant son financement total à 554 millions de dollars depuis sa création, la start-up est désormais valorisée 1,95 milliard de dollars et elle envisage une possible introduction en bourse.

Basée à Sunnyvale, en Californie, ThoughtSpot a été fondée en 2012 par deux anciens de Nutanix : Sudheesh Nair qui fut président de la société pionnière de l'hyperconvergence de 2011 à 2018, et Ajeet Singh, l'un de ses co-fondateur qui en a été chief product officer. Le troisième associé, Amit Prakash, actuellement CTO de ThoughtSpot, a, lui, travaillé pour Microsoft et Google.

Se posant en concurrent de Power BI de Microsoft, de Qlik ou encore de Tableau Software (récemment acquis par Salesforce pour 15,7 milliards de dollars), ThoughtSpot se présente comme une plateforme d'analytics "AI driven". Son originalité vient de son modèle de moteur de recherche à la Google qui permet de poser une requête en langage naturel de type "Quelles sont les ventes du produit X en Espagne entre janvier et mars 2019 ?" La solution affiche directement le graphique correspondant avec les données associées à la question en optant pour le modèle de représentation le plus pertinent.

Traitement automatique du langage naturel

Dans ce que ThoughtSpot appelle "l'analyse augmentée", plus besoin de savoir formuler une requête SQL. Selon Sudheesh Nair, interrogé par TechCrunch, l'IA de de la solution comprend l'intention de l'utilisateur derrière une question telle que "Quelle est la marge bénéficiaire de notre modèle de chaussures rouges à Portland ?". Fin 2018, ThoughtSpot a lancé SearchIQ, un outil de traitement du langage naturel (NLP) prenant en charge les requêtes vocales. Un atout en situation de mobilité.

Pour permettre la data visualisation en quasi-temps réel, l'éditeur fait appel un système maison de calcul exécuté en mémoire RAM massivement parallèle. Baptisé Falcon, il passe en revue un grand volume de données issues des systèmes d'information de l'entreprise (SIRH, CRM, ERP...) du cloud ou des réseaux sociaux.

"ThoughtSpot s'adresse aux non-techniciens, aux gestionnaires de la connaissance et aux décideurs business"

Dans le marketing, le commercial, la logistique ou le support, les cas d'usage sont nombreux qu'il s'agisse de mieux comprendre l'état actuel des activités au sein de ces directions ou d'anticiper les évolutions à venir. "Des clients du monde bancaire utilisent notre technologie pour les aider à définir les politiques de pricing et de vente de prêts financiers", explique Spencer Tuttle, nouveau vice-président en charge de la zone EMEA ThoughtSpot. "Un spécialiste de la santé par exemple pourra recourir à notre offre pour réduire le temps nécessaire à l'analyse des essais cliniques. De manière plus générale, les clients utilisent notre solution pour gérer leurs fournisseurs, réduire leurs risques et leurs coûts."

ThoughtSpot, dont l'effectif a dépassé les 500 employés fin 2018, compte BT, Daimler, Hulu, Scotiabank, Walmart ou encore 7Eleven parmi ses clients. L'entreprise a par ailleurs noué des accords avec Nielsen, Google Cloud ou encore avec le spécialiste de l'entrepôt de données en mode cloud Snowflake. Dans le cadre du partenariat signé avec ce dernier, ThoughtSpot a lancé, en juin dernier, un module, baptisé Embrace, permettant d'exécuter des traitements analytiques sur des bases de données existantes sans avoir besoin de déplacer ou de mettre en cache les données.

Vers une dimension collaborative

Dans son dernier quadrant magique sur les plateformes d'analytics et de business intelligence, le Gartner hisse ThoughtSpot de la catégorie des visionnaires, où il avait été classé par le cabinet en 2018, à celle des leaders aux côtés de Microsoft, Tableau et Qlik. Une ascension que l'institut américain justifie par la capacité d'innovation de l'éditeur et par un niveau de satisfaction clients élevé. Pour le Gartner, les requêtes prises en charge par ThoughtSpot en mode texte ou vocal permettent d'élargir le spectre des utilisateurs, au-delà de la population traditionnelle des spécialistes de la business intelligence. "ThoughtSpot a été conçu pour s'adresser aux non-techniciens, aux gestionnaires de la connaissance et aux décideurs d'entreprise en leur proposant une interface de recherche qu'ils connaissent déjà, inspirée de leurs applications grand public préférées", confirme Spencer Tuttle.

Quadrant magique 2019 du Gartner sur les plateformes d'analytics et de business intelligence. © Gartner

Du côté des freins à l'adoption de ThoughtSpot, le cabinet d'études note la nécessité en amont de préparer et de nettoyer les données à l'aide d'outils tiers. Autres remarques du Gartner : les tableaux de bords sont assez "basiques" et certains clients interrogés relèvent des fonctionnalités manquantes. ThoughtSpot manque aussi de contenus prédéfinis pour adresser des domaines verticaux et fonctionnels spécifiques. Enfin, ThoughtSpot est l'éditeurs du quadrant magique présentant les revenus les plus faibles.

Les nouveaux fonds levés par la société doivent justement lui permettre d'accélérer son développement à l'international et notamment en Europe. ThoughtSpot vient tout juste d'ouvrir un bureau à Paris. Sur la question de sa feuille de route en R&D, la start-up reste assez vague. Parmi ses principaux défis : donner une dimension collaborative à sa solution. "Les utilisateurs doivent pourvoir partager et commenter les conclusions de leurs pairs pour rendre virales les informations les plus précieuses", estime Spencer Tuttle. La société de Sunnyvale souhaite aussi investir dans la supervision des indicateurs métier en vue d'alerter les utilisateurs concernés de toute modification de leurs métriques.